[Page publiée le 22 novembre 2011, mise à jour le 8 février 2022]
Qui est “Oppa” ? Pourquoi tous les couples de Kdramas se séparent pour des raisons stupides avant de se réconcilier à la fin ? Qu’est-ce que le “syndrome du second-lead” dont toutes les fans semblent être atteintes ? Ce glossaire à l’ambition de répondre à vos questions brûlantes. Il en existe déjà sur le net comme le “Pop and Culture Commentary” de Javabeans et Girlfriday et leur glossaire général, mais j’ai tout de même voulu en écrire un généraliste et accessible aux néophytes en reprenant les termes qu’on peut croiser souvent, largement employés par les fangirls (et par moi-même sur mon blog). Vous en retrouverez certains sur l’Urban Dictionary, la bible du néo-langage populaire.
“Bias”

Lee Min Ho dans The King: Eternal Monarch (2020)
Terme emprunté au lexique de la Kpop qui désigne les acteurs/actrices pour lesquels on a un gros faible. Parmi les symptômes : compulsion de regarder tous les dramas de cette personne (même les pires), abonnement à divers réseaux sociaux sur elle, toujours soutenir son rôle quel qu’il soit (y compris quand il/elle joue le pire psychopathe), être complètement dévasté quand l’acteur ou l’actrice fait l’objet d’un scandale (avec toutes les phases du deuil : choc, déni, colère, négociation…), et j’en passe. On parle de “bias ultime” pour désigner le plus chéri d’entre ses bias, et parfois les femmes utilisent le terme “girl crush” pour parler de leurs actrices préférées. L’acronyme “ICOMYM” (Inappropriate Crush on Much Younger Men) était assez utilisé il y a quelques années pour parler d’un crush concernant un acteur très jeune, mais ça date d’une époque où internet aimait bien faire de l’humour sur la pédophilie (vous vous souvenez de pedobear, et du terme “jailbait” ?). Depuis les choses ont bien changées (à mon sens pour le mieux), et ce terme a pris sa retraite. Plus safe, l'”ajusshi crush” concerne un crush sur des acteurs qui ont au moins 35 ans, comme Lee Beom Soo, Uhm Tae Woong ou Lee Sun Kyun.
“Mane of Glory”

Jung Il Woo dans The Return of Iljimae (2009)
On peut traduire cette expression par “abondante chevelure glorieuse” ou carrément “crinière de la gloire” mais j’aime utiliser le terme anglais. Pas mal de nos ancêtres ont eu la bonne idée de considérer les cheveux longs chez les hommes comme le signe de leur puissance et de leur virilité. Certaines époques préférant les perruques ou les crânes tondus ne déclencheront pas de crises de fangirlisme, mais en général on aime voir des queues de cheval et autres franges virevoltantes dans les reconstitutions historiques, et cela concerne bien sûr les sageuks. Dans ces derniers (pour rappel : reconstitution historique exclusive à l’histoire de la Corée), la fangirl attendra avec une impatience le moment où le héros se débarrassera de son Gat (chapeau des classes supérieures) et dénouera ou coupera son Sang Tu (chignon des hommes porté en haut du crâne) pour laisser libre cours à sa belle chevelure sombre, parfaitement dégradée, lissée ou permanentée (même que nos propres coiffeuses ne font pas aussi bien). Ce geste est souvent associé à un passage du héros vers un statut de combattant plus sauvage et incivilisé, animé d’une rage vengeresse, et sinon la coiffure est également portée par les personnages de guerrier, hors la loi ou gardes du corps. Il arrive qu’une perruque malheureuse gâche l’effet, mais c’est rare.
“Noble Idiocy”

Song Joong Ki et Moon Chae Won dans Nice Guy (2012)
Au doux (?) pays des Kdramas, la “Noble Idiocy” est un procédé scénaristique largement employé en fin de course par les scénaristes qui n’ont pas écrit la résolution de leur histoire ou qui doivent faire face à une extension de dernière minute. Il consiste à créer une nouvelle rupture de l’OTP. Tout d’abord il faut générer une situation difficile pour l’un des membres du couple du fait de leur situation (le plus souvent l’opposition des parents ou la désapprobation du public s’imposent comme les prétextes les plus faciles). Ce membre souffre, et l’autre décide de le quitter “pour son bien”, la rupture étant un moyen de “libérer” l’autre de sa souffrance et pour le scénariste de créer à nouveau de la tension et des obstacles à résoudre pour tenir encore quelques épisodes de plus. Ce procédé usé jusqu’à la corde est frustrant pour le spectateur, parce qu’il conduit souvent à faire adopter au Noble Idiot un comportement qui nie sa personnalité et son évolution élaborés au cours des épisodes précédents, et parce qu’il engendre souvent encore plus de souffrance pour le membre du couple qui se croit délaissé voire trahi (oui parce qu’en plus il y a malentendu, histoire d’envenimer encore plus les choses).
Il existe des variantes tout aussi exaspérantes à ce procédé comme le Rabibochage (le héros se remet avec son ex envers laquelle il se sent coupable), le Voyage d’Etudes (j’ai l’impression qu’on commence à tourner la page mais il fut un temps où il était quasiment automatique) qui conduit à l’inévitable Scène d’Aéroport où celui/celle qui reste court après celui/celle qui part dans un élan de regret. Lie To Me est resté dans les annales en nous sortant la Recherche Existentielle (pourquoi pas…). Parfois on touche à l’absurde : par exemple dans la romance Do Do Sol Sol La La Sol, le comportement du héros à la fin n’a rien de noble et tout de l’idiotie. Voilà un article intéressant qui analyse en détail comment divers dramas traitent le sujet, avec plus ou moins de succès.
“OTP (One True Pairing)”

Ro Woon et Kim Hye Yoon dans Extraordinary You (2019)
A l’origine employée par les shippers de tout poil pour désigner leur “pairing” (couple) préféré, cette expression reprise par les beanies (lecteurs de Dramabeans) et autres fans sur diverses plateformes désigne le couple principal d’un drama, ou « couple du destin ». Vous avez des chances qu’ils se soient rencontrés pendant leur enfance/adolescence, et lorsque les temps sont durs ils se promettent de se retrouver dans leur prochaine vie. Généralement pour tout Kdrama standard vous pouvez repérer qui jouera l’OTP soit en regardant l’affiche, soit en repérant sur la fiche du casting les deux premiers acteurs cités. Dans 95% des cas vous pouvez être certains qu’ils finiront ensemble, même si on trouve quelques exceptions.
“Second-lead Syndrome”

Park Shin Hye et Jung Yong Hwa dans You’re Beautiful (2009)
Aaah le fameux second-lead syndrome. Il peut nous tomber dessus pour peu que l’on préfère le second couteau au héros, souvent parce que ce dernier est un goujat incurable, tandis que le second rôle masculin est un prince charmant (pensez au fameux triangle amoureux Domyouji/Tsukishi/Rui de Hana Yori Dango). Je sais que certaines amatrices de dramas avouent attraper le syndrome quasiment automatiquement, tandis que c’est plus occasionnel pour d’autres (je me positionne plutôt dans la seconde catégorie). C’est toujours déchirant dans la mesure où le second rôle masculin ne finira pas avec l’héroïne, selon la règle qui dicte que l’OTP doit finir ensemble. Le Joker était Park Shi Hoo, seul capable de faire tomber la règle jusqu’à forcer le scénariste à réécrire le destin de son personnage. Sinon, il ne reste au doux prétendant que ses yeux pour pleurer. Bae Soo Bin par exemple a élevé au rang d’art l’expression « je t’aime à mourir et je ferais tout pour toi, mais je m’effacerais au moindre signe de rejet de ta part ». Autrement Shin Woo dans You’re Beautiful est un bon exemple de lampadaire énamouré, condamné à regarder de loin les protagonistes se rapprocher. Un autre genre de second-lead syndrome peut tout à fait intervenir lorsque le héros est tout à fait charmant et le second rôle masculin un riche ingrat qui cache un secret douloureux et/ou un cœur honnête.
“BORA MUST DIE”

Sung Yuri et Hyun Bin dans The Snow Queen (2006)
Même si ce meme est obsolète, je le trouve intéressant parce qu’il reflète bien l’attitude du fandom envers les personnages féminins, et son évolution. En 2006 quand le drama à son origine (The Snow Queen) est sorti, les actrices principales rentraient dans deux catégories : héroïne gentille, et rivale méchante. On déteste la rivale (alors qu’on vénère en général le second-lead masculin) mais parfois on déteste aussi l’héroïne ! C’est le cas dans ce mélodrame, celles qui ont détesté s’insurgeaient contre le personnage de Bora joué par Sung Yuri qui faisait souffrir leur cher Binnie (Hyun Bin). En 2009 dans l’Open Thread N°112 de Dramabeans, Bellaza a écrit, l’esprit un peu embrouillé à 2 heure du matin : « Snow Queen est une expérience intéressante. Beaucoup de spectateurs veulent voir Bora mourir. » (remarque ironique puisque Bora est atteinte d’une maladie mortelle). Une autre commentatrice a repris l’idée en en faisant un slogan au second dégré : le pauvre Binnie souffre (en énumérant tous les travers par lesquels il passe dans Snow Queen, Ireland, Kim Sam Soon…). Cela empêche d’admirer ses traits parfaits, et par conséquent « BORA MUST DIE ».
Amusée Bellaza a élevé le débat : « En effet. Bora doit être sacrifiée afin d’apaiser la civilisation Maya et de la dissuader de mener à bien sa revanche en 2012. John Cusack l’a dit. BORA DOIT MOURIR !!!!! ». Et à partir de là c’est parti en total délire : “BORA DOIT MOURIR“, “SAUVEZ BORA“, “Au nom du Royaume de Shilla…BORA DOIT MOURIR !!! Pour sauver le monde en 2012…BORA DOIT MOURIR !!!“
En fait je pense que ces fans ont déliré pour désamorcer la situation qui commençait vraiment à s’envenimer à cause des antis qui trollaient sur les forums contre Sung Yuri et son personnage, prenant n’importe quel prétexte pour la critiquer. Stigmatiser Bora permettait de déplacer le conflit sur le personnage lui-même plutôt que sur Sung Yuri, et c’était très drôle. Mais ça en dit long sur la misogynie internalisée de nombre de fans, que l’on retrouve aussi dans le cadre des scandales impliquant des acteurs et des idoles de Kpop, avec le plus souvent des femmes victimes (“Oppa did nothing wrong/Oppa n’a rien de fait de mal“). Le double standard était tenace. Heureusement les choses ont évoluées depuis, avec l’écriture de personnages féminins plus nuancés, de dramas centrés sur l’amitié féminine, et le phénomène “girl-crush”. Ce n’est pas parfait, mais on est sur la bonne voie.
“Oppa”, « Oppa-Pout-Giggle » et “aegyo”

Joo Ji Hoon et Yoon Eun Hye dans Goong (2006)
Très caractéristique des jeunes idoles et actrices des années 2000 (dont Sung Yuri !), l’aegyo est une sorte de “baby talk”, qui consiste à jouer le petit lapin effrayé en minaudant « Oooppppaaaaa » devant un garçon ou un homme un peu plus âgé dont on veut obtenir quelque chose, en faisant la moue et en gloussant (d’où l’expression “Oppa-moue-gloussement”). C’est controversé, en raison de l’infantilisation des femmes que cette attitude perpétue. Quant au terme très chargé d'”oppa” lui-même, le drama Soulmate de 2006 a une scène excellente qui explique très bien les différents types d’usage de cette appellation qui dépends de l’âge et du sexe des interlocuteurs, et cet article de Dramabeans reste une référence. Pour résumer il existe trois grandes catégories d'”oppa” utilisées par les femmes : le frère/cousin biologique plus âgé, le garçon plus âgé de manière générale (plus employé par les petites filles), et le petit-ami/garçon qu’on cherche à séduire. De quoi se mélanger les pinceaux ! Pour aller plus loin je vous recommande de chercher la signification des termes “noona”, “dongsaeng”, “hyung”, “unnie”, “hoobae”, “sunbae”, “ajusshi” et “ajumma”, ça vous aidera dans vos premiers pas à Drama-land.
“Shower Scene (scène de douche, plan douche)”

Eric Moon dans Spy Myung Wol (2011)
L’une des premières choses qui m’a frappée avec les Kdramas, c’est le fanservice orienté vers le public féminin. Quand on est habitué au fanservice version anime avec une pluie de culottes et de matheux adulescents qui se retrouvent soudain à la tête d’un harem impressionnant, les Kdramas sont une véritable oasis (Bollywood c’est pas mal aussi dans le genre). A Kdrama-land, si le décolleté féminin est rare, il n’est pas rare de voir exposés les sublimes abdos des acteurs. La “post-army shower scene” (scène de douche post service militaire) est devenue un must. La piscine fonctionne aussi comme prétexte. Ce genre de scène a une double fonction intéressante car un peu paradoxale : il s’agit à la fois d’affirmer la virilité, la masculinité et la maturité de l’acteur principal, et de permettre au public (majoritairement féminin) de se rincer l’œil. Il ne s’agit pas d’une pure démonstration de force et de puissance comme on peut en trouver dans des films d’action, il faut séduire, et aussi montrer de la vulnérabilité. En effet, ce genre de scène est souvent associé à une crise émotionnelle du héros en plein doute (d’où les scènes de douche à grand miroir) ou détresse émotionnelle. Ces scènes ont été parodiées pour notre plus grand plaisir, notamment dans les dramas Chief Kim et Vincenzo du scénariste Park Jae Bum.
Truck of Doom/Cliff of (not) Doom/Piscine de la Renaissance

Seo In Gook et Park Bo Young dans Doom at your service (2021)
Quand on veut faire mourir un ou plusieurs personnage(s), souvent au début d’un drama, rien de tel que le bon vieux Truck of Doom (Camion de la Mort), cousin du Truck-kun très actif dans les animes qui expédie des protagonistes désabusés dans des mondes parallèles. Je ne sais pas si c’est la peine de tout réexpliquer compte tenu de sa grande réputation, mais en gros c’est un moyen facile pour les scénaristes et réalisateurs d’intégrer une scène tragique de décès, accidentel ou commandité, en faisant entrer un gros camion en collision avec le personnage visé ou son véhicule. Truck of Doom n’est pas subtil mais il fait le job : la scène n’est pas très dure à tourner, et visuellement le rendu est à la fois impressionnant, simple à comprendre et expéditif.

Les falaises de Buyongdae
Les fans se sont rendus compte qu’il existe un pendant dans les sageuks, mais à la fonction inverse : le Cliff of (not) Doom que j’aime bien appeler “Falaise de la survivance”, une falaise qui apparaît inévitablement quand les héros sont acculés par les méchants (souvent il s’agit des falaises de Buyongdae), et de laquelle ils se jettent pour leur échapper. Pas d’hydrocution ni de corps broyés sur les rochers : à Kdrama-land, les falaises et la mer ou la rivière en contrebas sont les meilleurs sorties de secours (très bon moyen de se faire passer pour mort et revenir quelques années plus tard pour se venger). En bonus on peut enchaîner avec une scène de “bassin/piscine de la renaissance” (en théorie les personnages sont dans la mer ou la rivière, mais on devine que c’est une piscine), une scène où le personnage principal plonge, perd conscience et ressort (après une période absurdement longue), sauvé des eaux, pour symboliser une renaissance, ou un moment magique transitionnel (comme dans Lovers of the Red Sky ou Scarlet Heart).
“Wrist-grab”, “Piggyback-ride”, “back-hug”, “fish kiss”…

Kim Soo Hyun et Seo Ye Ji dans It’s Okay to not be Okay (2020)
Les romances sud-coréennes ont développé leur langage cinématographique pour signifier une évolution de la relation entre les protagonistes. Ainsi le “wrist-grab” (prise par le poignet) trahit l’impulsion d’emmener l’être aimé à l’écart, le “piggyback-ride” (porter quelqu’un sur son dos) signale une première marque de confiance et d’entraide, le “back-hug” (câlin de dos) un désir de proximité quand les temps sont durs et que les héros ne peuvent pas être ensemble, le “fish kiss” (bisous de poisson) un premier baiser chaste, les lèvres fermées. Il y en a d’autres. Ils sont si reconnaissables qu’ils sont largement parodiés, par exemple dans cette publicité japonaise pour la marque de soju chamisul.